Vous qui me dévisagez
comme le dernier des forcenés
sachez que je ne suis pas d’ici
chaque rue me coule dessus
alors je me glisse dans la première maison venue
déloge ses habitants
m’imagine vivre à leur place
j’apprivoise la normalité
prends des notes
les efface aussitôt
frappe à d’autres portes
me fais inviter dans les règles
et après quelques verres
la certitude de trop
jusqu’au désespoir
ma colère nichée en travers de la fenêtre
un réveil difficile
vidé de tout
même de mon amertume
incapable de me souvenir du jour
et de reprendre la route
***
La nuit je l’entends, attablé
se consumant à mon bureau
les touches craquent
il redouble de violence
je le sens
à la lueur fébrile de l’aube
essayer de gagner du temps sur moi
ses traits sont presque identiques aux miens
l’obscurité allonge un peu plus ses mains
mais son âme coule coule aux bouts de ses doigts
tandis que la mienne végète
pas un mot qui ne soit éprouvé
le manuscrit que je récupère au petit matin
est le testament d’un damné
Extraits de » Imprécations nocturnes » éditions Conspiration, collection La poésie, 2022.
GRÉGORY RATEAU
Plus d’infos : https://fr.wikipedia.org/wiki/Gr%C3%A9gory_Rateau


Très beaux poèmes. Une constance dans l’excellence. les poèmes de Grégory RATEAU sont aussi sombres que lui est lumineux.
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