Poète, peintre, revuiste » Mot à maux » et blogueur. Né le 11 mai 1974 à Parthenay dans les Deux-Sèvres et décédé le 22 janvier 2023 à Talmont-Saint-Hilaire en Vendée.
A votre nuit précoce, ô nullement caduques Ténèbres, celui-là que cernent ces lauriers M’arrache s’il poursuit ses pas aventuriers Jusqu’au jour ambitieux où mon amour l’éduque.
Nous marchons. Je retrouve aux pointes des fétuques La sensibilité de bras suppliciés De n’épouser jamais que le balancier Du faisceau de soupçons rassemblés sur sa nuque.
C’est moi pourtant, moi débordante d’abandon, Mais muettement moi telle criante offrande, Et d’avance fidèle à toute prévision
Superbe d’une perte immortellement grande : Je suis la vérité vivante à condition Qu’un pur aveuglement longuement l’appréhende.
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Pachira
Experte à feindre le repos, L’élégante tend tout son être Vers les entraves de son pot, Mais ses chapeaux à la fenêtre !
Ah, comme sait lascivement Faire semblant de ne pas croître Depuis le terreau qui la cloitre Une plante d’appartement !
Oui, la farouche aux mains de palme Enfle si bien, restant si calme Qu’elle en déconcerte l’esprit ;
Car tandis que ses tiges s’écartent On voit se déplier la carte Où leur réseau était inscrit.
GRÉGOIRE LEPRINCE-RINGUET
Il se présente :
Acteur au cinéma et au théâtre depuis un vingtaine d’années, je suis également l’auteur et réalisateur d’un film sorti sur les écrans en 2016, La Forêt de Quinconces, qui fut en sélection officielle au Festival de Cannes la même année, et dont le texte est paru chez l’Arche éditeur l’année suivante.
En parallèle de mes activités cinématographiques et théâtrales, j’ai écrit une trentaine de poèmes non encore publiés et j’aimerais beaucoup que certains d’entre eux connaissent leur première diffusion grâce à votre revue.
Dans cette perspective, je joins à ce courriel six textes qui me paraissent assez représentatifs de mon travail par la variété de leurs thèmes, de leurs tonalités, et de leurs longueurs.
Dans l’attente de votre réponse, je vous prie d’agréer, madame, monsieur, l’expression de mes salutations distinguées.
Karen Cayrat est née en Lorraine, dans l’est de la France où elle réside encore aujourd’hui. Traductrice/interprète (–>FR) ses langues de travail comprennent l’anglais, l’allemand et l’espagnol. Elle s’intéresse, en outre, à la littérature numérique. Fondatrice et directrice de publication de Pro/p(r)ose Magazine, revue littéraire et culturelle en ligne, publiée le dernier dimanche tous les deux mois, Karen Cayrat, pratique l’écriture en sous-marin depuis de nombreuses années. Cultivant les pas de côté comme la rage d’exister, ses productions naviguent entre approches expérimentale, poétique, et engagée. Quêtant l’aurore du monde et des êtres, ses créations embrassent des thèmes multiples parmi lesquels se distinguent plusieurs constantes (identité, mémoire, langage, figure de l’écrivain…). Certains de ses textes et poèmes ont été publiés dans des revues nationales et internationales, au format papier et numérique (Revue Labyrinthe[s, Le Cafard hérétique, La Variation, Hurle-Vent, Cavale : arts et littératures en mouvement, Lichen, L’Air de Rien, Revue Fragile, Hélas!, Pojar, Revista Kametsa, Libreroamérica, FMR, Orientales…). En 2022, une de ses productions, Osmose, obtient le « Prix coup de cœur du jury » dans le cadre du concours d’écriture organisé par le Louvre-Lens à l’occasion des 10 ans de la structure (aux côtés d’un texte de Nicolas Perez) pour la qualité et l’originalité intrinsèque à son écriture. Plusieurs de ses créations ont été diffusées sur les ondes de podcasts ou initiatives (comme Mange tes mots, à marée vague…) accompagnées de musiques de sa composition. D’autres expériences se découvrent dans l’espace de son site-atelier Dérivations, zone de hors-confort, laboratoire instable et clandestin. Un espace fluctuant entre écriture créative et écriture sans écriture.
un jour noir de novembre où le jour, il fait gris.
Et m’enveloppe la suie du soir,
et m’engloutit la nuit.
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Brèche
Un oiseau déchire la brume
Son cri perçant dans le ciel
comme un cri de mort et d’ effroi,
un râle rauque pour l’ éternité.
C’est une mouette qui lacère le ciel,
fait entrer l’aube dans cette échancrure
où les moineaux s’abreuvent
de cette rose naissante,
de ce pâle soleil d’hiver.
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Jeux d’enfant
Sur la plage encore maculée de soleil du soir,
des jeux d’enfant creusent la rivière de sable.
Plus loin, la mer impénétrable.
À mes pieds, des sceaux, des pelles et des râteaux,
des moules en plastique aux couleurs primaires :
rouge crépusculaire, bleu comme la mer,
jaune comme le soleil brûlant de midi.
Objets inanimés de l’enfance gisent abandonnés,
creusent des sillons dans le sable
aux côtés des coquillages, des algues fossilisées.
Cinquante ans ont passé depuis
et dans mes rêves, encore, il m’arrive
de boire ce ciel bleu, la mer vif-argent,
de boire ce vin rouge du couchant,
courant après les mouettes,
comme après des folles chimères,
cherchant avidement les reliques de mon passé.
ALIX LERMAN ENRIQUEZ
La poétesse Alix Lerman Enriquez s’adonne à l’écriture poétique depuis son plus jeune âge. Née à Paris le 5 mai 1972, elle vit depuis vingt ans à Strasbourg après avoir goûté à la vie rennaise et parisienne. Titulaire d’un doctorat de philosophie du droit, l’auteure a déjà publié une quinzaine de recueils de poésie comme Météores (Editions La Bartavelle 2005), A-Contre-jour (Hervé Roth Editeur 2013), Les territoires de la nuit pourpre (Do Bentzinger Editeur 2012), Herbier d’errances (Editions Flammes Vives 2016), Au-delà de la nuit (Editions Les poètes français 2016), Tessons et miroir (Editions Vox Scriba 2017), Estuaire de l’espoir (Editions flammes vives 2018), La morsure du jour sur la mer (éditions les poètes français 2018), Bribes du jour, éclats de nuit, (Editions Stellamaris, 2019), Tombée du ciel (Editions les poètes français 2021). Elle est également l’auteur de proses poétiques sur le site de l’éditeur Hervé Roth et anime elle-même deux blogs poétiques Perles de poésie et Aphorismes et petits riens .
Je reviens au Cahier de Brouillon. J’écris le 05 juillet de la même année : Les mythes fondateurs ( Oedype, Jonas ….) ne doivent pas être oubliés car le silence est de mauvais augure pour l’Humanité. Plus loin : Poètes préférés : Salomon, L’Ecclésiaste, le Cantique des Cantiques, Baudelaire, Poe, Rimbaud, Apollinaire, Verlaine, Mallarmé, les Surréalistes, René Char, Michaux, Prévert, Queneau, William Blake, Dylan Thomas, Jim Morrison, Khayyâm, Léopold Sedar Senghor, Lao Tseu… Plus loin, la généalogie de Jésus. Plus loin : Ne pas se poser des questions conditionnées Le soleil festonne au-delà du Mythe Fondateur. Toujours des poèmes. Le 15 juillet : Il faut que j’aie confiance en moi. Je réussirai et ce sera une victoire pour moi. Il faut que je tienne bon la barre. Le 22 : je fête mon anniversaire, j’ai trente ans. Vertiges, nausée, migraines, impossibilité de marcher, je reste allongé. Le soleil dehors est aveuglant. Marie, mes parents, quelques proches sont là. Je ne supporte plus l’Haldol et le Tercian. On me prescrira en substitution du Solian qui fonctionne bien sur moi. Le 25 : En finir avec mes élucubrations. Penser positif. Bien écouter. Bien voir. Bien sentir. Le 1 er août : Avec Marie, c’est fini. Elle me l’a dit tout en douceur, ça me fait de la peine. Une de perdue, dix de retrouvées ? 77 jours. J’écris Passions Sabbatiques et quelques poèmes. Une amie Chrystel me recontacte, nous allons à des soirées gothiques. Mois d’août en Région Parisienne. Marie est en Bretagne. Je dessine beaucoup, des femmes nues, au stylo, au feutre, au crayon , au pastel. Calme plat sur le plan sentimental. Quelques sorties avec des amis ( Gérard, Patrick, Sami, Nadine) et mon frère Johann. Je traverse une période, où semble-t-il par la grâce de Dieu, je m’affirme autant sur le plan financier que sur le plan créatif. Je touche des indemnités journalières. Ma mère m’a aidé à renflouer mon compte bancaire. Le Malade Psychique n’est pas vraiment un bon comptable et peut souvent faire des dépenses inconsidérées, pulsionnelles. Dans mon Cahier, beaucoup de citations d’écrivains, de philosophes et d’artistes. Je passe beaucoup de temps à la Bibliothèque Municipale de Joinville le Pont.
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Aller sur mes pas d’il y a vingt-cinq ans est difficile et j’ai peur pour ma raison. Tout voyage est intérieur certes mais tout voyage fait revivre les souvenirs qui y sont attachés Je ne voudrais pas remuer les larmes du passé et l’effroi et la stupéfaction de mes proches. Il y a leur pudeur, je n’en ai peu ou plus vraiment.
Je parcours les pages du Cahier de Brouillon dont une partie fut en effet rédigée pendant mon internement en juin 1996.
Je tombe sur un poème écrit le 13 juillet 1996, en hommage à mon oncle André, disparu en 1983, des suites d’une longue maladie. C’est en rouge.
André
Ce matin j’ai cueilli la fleur
de la Miséricorde
La langue des on-dits
et des non-dits
La fleur sauvage de Babel
Plus loin un symbole : 3 yeux ouverts qui égalent un mandala qui égale un signe cabalistique.
Je ne sais absolument pas ce que cela signifie. C’est cela, la folie, celle qu’on ne comprend pas, qui ne nous est pas donnée comme intelligible. N’attendez pas de moi que j’en donne une définition, pour moi la folie n’est qu’ontologique, elle est simplement.
A Marie-Isabelle, j’écris : Ce qu’il me manque : un fils nommé David ou Olivier ou bien une fille nommée Lucie ou Julie.
Je dois bien reconnaître alors que ma schizophrénie est résiduelle. Et cela pendant quelques mois. Presque vingt-cinq ans, plus tard, je suis toujours sous traitement certes plus léger, mais quand même. Il m’arrive parfois de penser que j’ai rencontré Dieu à cette époque-là ou l’équivalent sans pour autant croire que je suis un prophète ou un quelconque messager d’une foi moderne. Le mysticisme, je dis bien, le mysticisme, et non la religiosité ou l’aspect religieux, est à la base de ma poésie, de mon écriture, de ma peinture, de mes dessins, de mes éructations symboliques. Je suis le créateur, malgré moi, de mes démons. Toucher à Dieu c’est toucher à l’être. Se prendre pour Dieu, le singer, lui ressembler et se faire passer pour Lui. L’écriture ( et toute représentation ) est forcément blasphématoire. Pourquoi moi, goy, dire que je suis Élie, le prophète que tous les Juifs attendent depuis très longtemps ? Un de mes psychiatres, M. Dobler m’avait dit il y a quelques années que j’avais été atteint du syndrome du Mysticisme et Filiation. Me persuader de mes origines prétendument Juives et être un Prophète de l’Ancien Testament. C’est donc bien que l’artiste, le poète, le fou se prend pour Dieu ou un dieu ( Napoléon, Marx ou De Gaulle ou Jeanne d’Arc ).
Extraits de » Quelques saisons en enfer » ( récit)
autoédité sur Amazon KDP, 2023.
( Maj 14/03/2023 )
ÉRIC DUBOIS
Eric Dubois est né en 1966 à Paris. Auteur de plusieurs ouvrages de poésie et récits aux éditions Le Manuscrit, Encres Vives, Hélices, l’Harmattan, Publie.net, Unicité, Le Lys Bleu. Responsable de la revue de poésie en ligne « Le Capital des Mots » ( 2007-2020) et de l’association éponyme ( 2015). Responsable de la revue de poésie en ligne « Poésie Mag » (2020). Blogueur : « Les tribulations d’Eric Dubois » (2009-2020). Il est aussi l’auteur d’un récit autobiographique « L’homme qui entendait des voix » paru en 2019 aux éditions Unicité.