Élie est magique
et thérapise
Élie il faut suivre
le soleil le fixer
et en transmettre
la force
12.08.96
Je reviens au Cahier de Brouillon. J’écris le 05 juillet de la même année : Les mythes fondateurs ( Oedype, Jonas ….) ne doivent pas être oubliés car le silence est de mauvais augure pour l’Humanité. Plus loin : Poètes préférés : Salomon, L’Ecclésiaste, le Cantique des Cantiques, Baudelaire, Poe, Rimbaud, Apollinaire, Verlaine, Mallarmé, les Surréalistes, René Char, Michaux, Prévert, Queneau, William Blake, Dylan Thomas, Jim Morrison, Khayyâm, Léopold Sedar Senghor, Lao Tseu… Plus loin, la généalogie de Jésus. Plus loin : Ne pas se poser des questions conditionnées Le soleil festonne au-delà du Mythe Fondateur. Toujours des poèmes. Le 15 juillet : Il faut que j’aie confiance en moi. Je réussirai et ce sera une victoire pour moi. Il faut que je tienne bon la barre. Le 22 : je fête mon anniversaire, j’ai trente ans. Vertiges, nausée, migraines, impossibilité de marcher, je reste allongé. Le soleil dehors est aveuglant. Marie, mes parents, quelques proches sont là. Je ne supporte plus l’Haldol et le Tercian. On me prescrira en substitution du Solian qui fonctionne bien sur moi. Le 25 : En finir avec mes élucubrations. Penser positif. Bien écouter. Bien voir. Bien sentir. Le 1 er août : Avec Marie, c’est fini. Elle me l’a dit tout en douceur, ça me fait de la peine. Une de perdue, dix de retrouvées ? 77 jours. J’écris Passions Sabbatiques et quelques poèmes. Une amie Chrystel me recontacte, nous allons à des soirées gothiques. Mois d’août en Région Parisienne. Marie est en Bretagne. Je dessine beaucoup, des femmes nues, au stylo, au feutre, au crayon , au pastel. Calme plat sur le plan sentimental. Quelques sorties avec des amis ( Gérard, Patrick, Sami, Nadine) et mon frère Johann. Je traverse une période, où semble-t-il par la grâce de Dieu, je m’affirme autant sur le plan financier que sur le plan créatif. Je touche des indemnités journalières. Ma mère m’a aidé à renflouer mon compte bancaire. Le Malade Psychique n’est pas vraiment un bon comptable et peut souvent faire des dépenses inconsidérées, pulsionnelles. Dans mon Cahier, beaucoup de citations d’écrivains, de philosophes et d’artistes. Je passe beaucoup de temps à la Bibliothèque Municipale de Joinville le Pont.
***
Aller sur mes pas d’il y a vingt-cinq ans est difficile et j’ai peur pour ma raison. Tout voyage est intérieur certes mais tout voyage fait revivre les souvenirs qui y sont attachés Je ne voudrais pas remuer les larmes du passé et l’effroi et la stupéfaction de mes proches. Il y a leur pudeur, je n’en ai peu ou plus vraiment.
Je parcours les pages du Cahier de Brouillon dont une partie fut en effet rédigée pendant mon internement en juin 1996.
Je tombe sur un poème écrit le 13 juillet 1996, en hommage à mon oncle André, disparu en 1983, des suites d’une longue maladie. C’est en rouge.
André
Ce matin j’ai cueilli la fleur
de la Miséricorde
La langue des on-dits
et des non-dits
La fleur sauvage de Babel
Plus loin un symbole : 3 yeux ouverts qui égalent un mandala qui égale un signe cabalistique.
Je ne sais absolument pas ce que cela signifie. C’est cela, la folie, celle qu’on ne comprend pas, qui ne nous est pas donnée comme intelligible. N’attendez pas de moi que j’en donne une définition, pour moi la folie n’est qu’ontologique, elle est simplement.
A Marie-Isabelle, j’écris : Ce qu’il me manque : un fils nommé David ou Olivier ou bien une fille nommée Lucie ou Julie.
Je dois bien reconnaître alors que ma schizophrénie est résiduelle. Et cela pendant quelques mois. Presque vingt-cinq ans, plus tard, je suis toujours sous traitement certes plus léger, mais quand même. Il m’arrive parfois de penser que j’ai rencontré Dieu à cette époque-là ou l’équivalent sans pour autant croire que je suis un prophète ou un quelconque messager d’une foi moderne. Le mysticisme, je dis bien, le mysticisme, et non la religiosité ou l’aspect religieux, est à la base de ma poésie, de mon écriture, de ma peinture, de mes dessins, de mes éructations symboliques. Je suis le créateur, malgré moi, de mes démons. Toucher à Dieu c’est toucher à l’être. Se prendre pour Dieu, le singer, lui ressembler et se faire passer pour Lui. L’écriture ( et toute représentation ) est forcément blasphématoire. Pourquoi moi, goy, dire que je suis Élie, le prophète que tous les Juifs attendent depuis très longtemps ? Un de mes psychiatres, M. Dobler m’avait dit il y a quelques années que j’avais été atteint du syndrome du Mysticisme et Filiation. Me persuader de mes origines prétendument Juives et être un Prophète de l’Ancien Testament. C’est donc bien que l’artiste, le poète, le fou se prend pour Dieu ou un dieu ( Napoléon, Marx ou De Gaulle ou Jeanne d’Arc ).
Extraits de » Quelques saisons en enfer » ( récit)
autoédité sur Amazon KDP, 2023.
( Maj 14/03/2023 )
ÉRIC DUBOIS
Eric Dubois est né en 1966 à Paris. Auteur de plusieurs ouvrages de poésie et récits aux éditions Le Manuscrit, Encres Vives, Hélices, l’Harmattan, Publie.net, Unicité, Le Lys Bleu. Responsable de la revue de poésie en ligne « Le Capital des Mots » ( 2007-2020) et de l’association éponyme ( 2015). Responsable de la revue de poésie en ligne « Poésie Mag » (2020). Blogueur : « Les tribulations d’Eric Dubois » (2009-2020). Il est aussi l’auteur d’un récit autobiographique « L’homme qui entendait des voix » paru en 2019 aux éditions Unicité.
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