À peine enclenchée la sirène d’alerte,
Yuko et ses douze collègues, disciplinés,
étaient montés très vite sur le toit de la banque.
Dix mètres, ça devait suffire.
Quinze heures vingt-et-une. Elle envoie
à son mari ces deux mots – pleins
d’effroi : tsunami énorme.
À cette heure-là, déjà la vague
de treize mètres
est passée par-dessus les quais du port
charriant tout sur son passage –
***
» Je pense que l’eau a dû atteindre le toit
en quelques minutes » dit Yasuo, chauffeur de bus,
cinquante-sept ans, au journaliste qui l’interroge trois ans
après la catastrophe.
Son fin visage émerge d’une combinaison
de plongée,
» Elle me manque infiniment « , ajoute-t-il.
En ce jour de 2014, il réalise enfin son projet insensé :
pouvoir fouiller lui-même le fond de la mer.
Depuis trois ans, il suit une formation théorique et pratique
pour obtenir le brevet de plongée, dans l’espoir de
retrouver celle qui a disparu
le onze mars 2011.
Extraits de » La noyée d’Onagawa », Éditions Jacques André, 2020. Préface de Xavier Bordes. Prix Quai en poésie 2021.
MARILYNE BERTONCINI
Plus d’infos : https://www.recoursaupoeme.fr/author/marilyne-bertoncini/

